Le tribunal de Paris a relaxé jeudi un journaliste et le directeur de publication de «La lettre du continent», poursuivis en diffamation par le président ivoirien Alassane Ouattara pour un article de 2017 sur les fonds souverains de ce pays.

Le président avait porté plainte en France après la publication d'une brève intitulé «Côte d'Ivoire - Ouattara fait exploser les fonds souverains», publiée le 30 août 2017 dans le bimensuel, aujourd'hui devenu un quotidien sous le nom d'Africa Intelligence. Dans cet article très court, le journal écrivait que M. Ouattara «bénéfi[ciait]» d'un fonds souverain de 342,6 milliards de francs CFA soit 521 millions d'euros, «en hausse de 20 milliards par rapport à 2015», une «enveloppe budgétaire» dans laquelle il pouvait «d'autant mieux puiser à sa guise» qu'elle était «directement gérée par son frère, le ministre des affaires présidentielles Birahima Téné Ouattara».

Dans son jugement rendu jeudi, le tribunal a estimé que les propos étaient bien diffamatoires mais que les prévenus devaient être relaxés au bénéfice de la bonne foi. Le tribunal a souligné que l'article s'inscrivait dans un «débat d'intérêt général» et que le journaliste disposait d'une «base factuelle suffisante» pour publier les propos. Il a aussi relevé le «ton modéré» utilisé «à l'exception de quelques termes critiques», qui «demeurent adaptés à la ligne éditoriale» de la publication.

M. Ouattara estimait que ces propos «lui imputaient par insinuation de se livrer à un détournement de fonds publics, avec la complicité de son frère». Il contestait les chiffres avancés comme étant un «amalgame inexact de plusieurs rubriques budgétaires». Dans ce dossier, la défense avait souligné l'indépendance de la rédaction vis-à-vis des gouvernements et partis, rappelant que le sujet de l'article attaqué avait déjà été traité par le journal en 2012 et 2014, tout en défendant la bonne foi du journaliste et le sérieux de l'enquête. «On a fait notre travail de journaliste, le tribunal l'a reconnu», a déclaré jeudi à l'AFP le directeur de publication Maurice Botbol.

Alassane Ouattara, 78 ans, a été réélu le 31 octobre pour un troisième mandat controversé, jugé inconstitutionnel par l'opposition, qui a boycotté le scrutin et ne reconnaît pas sa réélection. Les violences électorales ont fait 85 morts et un demi-millier de blessés entre août et novembre. Marquant une nouvelle décrispation de la situation politique, l'ensemble de l'opposition ivoirienne a cependant annoncé jeudi sa participation aux élections législatives du 6 mars avec pour objectif de décrocher «la majorité au Parlement».

Lefigaro.fr

 

Le 8 janvier 2021

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