pour réclamer un encadrement plus strict de la vente d'armes à feu après une série de tueries de masse en milieu scolaire. /Photo prise le 24 mars 2018/REUTERS/Aaron P. Bernstein
"Plus jamais", ont entonné samedi des centaines de milliers de personnes, en majorité des jeunes, lors de rassemblements dans plusieurs villes des Etats-Unis, dont Washington

WASHINGTON  - "Plus jamais", ont entonné samedi des centaines de milliers de personnes, en majorité des jeunes, lors de rassemblements dans plusieurs villes des Etats-Unis, dont Washington, pour réclamer un encadrement plus strict de la vente d'armes à feu après une série de tueries de masse en milieu scolaire.

Au cours de ce qui constitue l'un des plus grands rassemblements de la jeunesse américaine depuis plusieurs décennies, de nombreux activistes se sont déployés afin d'inscrire des milliers de jeunes sur les listes électorales, en vue notamment des élections de mi-mandat prévues en novembre.

A Washington, des lycéens de Parkland en Floride, où un tueur de 19 ans a abattu 17 personnes le 14 février, étaient présents parmi les 500.000 manifestants espérés par les organisateurs de la "Marche pour nos vies" (March For Our Lives) sur Pennsylvania Avenue, près du Capitole.

Le tueur, un ancien élève de l'établissement renvoyé pour son comportement violent, avait réussi à se procurer aisément l'arme automatique dont il s'est servi.

Les manifestations et marches lancées par les adolescents rescapés du massacre visent, fait inédit, à favoriser un cadre législatif plus contraignant pour l'obtention d'armes à feu.

A Washington où se tenait le plus important des 800 évènements programmés samedi dans le monde entier, les manifestants s'en sont particulièrement pris à l'inaction des élus face à la multiplication des tueries de masse.

"S'ils préfèrent les armes à nos enfants, votez contre eux", disait une pancarte brandie par un protestataire.

"Politiciens : soit vous représentez le peuple, soit vous prenez la porte. Soutenez-nous ou méfiez-vous, les élections approchent", a lancé à la foule Cameron Kasky, 17 ans, un des lycéens venus de Parkland.

Même tonalité chez David Hogg, un autre rescapé de la fusillade en Floride : "Nous allons nous assurer que les meilleures personnes se présenteront aux élections non pas en tant que politiciens, mais en tant qu'Américains", a-t-il dit.

Puis, pointant le dôme du Capitole voisin, où siège le Congrès des Etats-Unis, il a ajouté : "Nous pouvons et nous allons changer le monde."

"ÔTER LEUR LIBERTÉ"

Les chaînes américaines ont diffusé les images de jeunes marchant avec la même détermination dans les rues de nombreuses villes américaines, comme Atlanta, Baltimore, Boston, Chicago, Los Angeles, Miami, Minneapolis, San Diego ou New York.

Des rassemblements étaient aussi prévus à Londres, Stockholm et Sydney.

Les organisateurs des manifestations veulent faire pression sur le Congrès, au sein duquel le lobby des armes, la National Rifle Association (NRA) est très influent, afin que les élus interdisent notamment la vente de fusils d'assaut comme celui qui a servi pour la tuerie de Parkland. Les élus du Congrès devraient pour la plupart se porter candidats aux élections de mi-mandat en novembre.

Bien qu'il ait fait récemment quelques modestes concessions, Donald Trump demeure un farouche partisan du droit de port d'arme.

Le président américain ne s'est pas exprimé samedi mais la porte-parole adjointe de la Maison blanche, Lindsay Walters, a fait savoir que son administration félicitait les "nombreux jeunes Américains courageux" qui exercent leur droit d'expression.

Parallèlement à ces rassemblements, des partisans du port d'arme ont aussi fait entendre leurs voix dans de nombreuses villes américaines, en rappelant que posséder une arme est un droit constitutionnel.

"Tout ce qu'ils font, c'est de demander au gouvernement de leur ôter leur liberté", a déclaré Brandon Howard, un partisan de Donald Trump âgé de 42 ans, en référence aux participants de la "Marche pour nos vies" à Washington.

"Ne touchez pas à mon arme", était-il écrit sur une pancarte brandie par Howard.

Conner Humphrey, un Californien de 16 ans en vacances à Washington avec sa famille, a expliqué qu'il possédait des armes et les utilisait de manière responsable, pour chasser et pour du tir sur cible.

"Les armes ne tuent pas les gens. Ce sont les gens qui tuent les gens", a déclaré le jeune homme, qui arborait un t-shirt rouge floqué du slogan de Donald Trump, "Make America Great Again".

OBAMA ET DES CÉLÉBRITÉS MOBILISÉS

L'ancien président démocrate Barack Obama, qui s'est heurté pendant ses deux mandats au refus des républicains de légiférer sur les armes à feu, n'a pas manqué l'occasion de s'inviter dans le débat, déclarant samedi sur Twitter que "rien ne peut résister à des millions de voix réclamant un changement".

"Cela va devenir le problème numéro un de notre pays", avait estimé jeudi Alfonso Calderon, un élève du lycée de Parkland, lors d'une rencontre avec des étudiants de Washington.

Des célébrités se sont mobilisées pour l'occasion. A Los Angeles, l'actrice et humoriste Amy Schumer a annoncé sa venue. George Clooney et son épouse ont fait un don de 500.000 dollars et dit qu'ils viendraient au rassemblement de Washington, où la chanteuse Ariana Grande était aussi attendue.

A New York, l'ancien Beatles Paul McCartney s'est joint à la foule et a rappelé sur CNN qu'il avait une raison personnelle d'être présent : "Un de mes meilleurs amis a été abattu pas loin d'ici", a-t-il dit en évoquant l'assassinat de John Lennon près de Central Park en 1980.

Non loin de lui, de jeunes manifestants scandaient : "Hey, hey, NRA, combien d'enfants as-tu tué aujourd'hui?"

La tuerie de Parkland est à ce jour la deuxième plus meurtrière en milieu scolaire après l'attaque de l'école élémentaire de Sandy Hook à Newton (Connecticut) qui avait coûté la vie à 20 enfants et six adultes en décembre 2012.

La question de la sécurité dans les écoles occupe depuis une large place dans le débat public. Une majorité d'Américains souhaitent à la fois un renforcement du contrôle des armes à feu et la présence de vigiles armés dans les écoles.

A la veille de la mobilisation des partisans d'un contrôle sur les armes, le département de la Justice a proposé vendredi une interdiction des "bump stocks", ces dispositifs qui modifient une arme semi-automatique afin de pouvoir tirer en rafale comme avec une arme automatique.

(Lacey Johnson et Lauren Youg à Washington, Alice Popovici à New York et Zachary Fagenson à Parkland; Eric Faye, Pierre Sérisier, Tangi Salaün et Jean Terzian pour le service français).

 

Teuters - par Ian Simpson et Katanga Johnson

Le 25 mars 2018