Au Mali, les ex-rebelles du Nord appellent les Touareg à « contribuer à l’effort de guerre » contre la junte

La Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), une alliance de groupes à dominante touareg, avait signé un accord de paix avec Bamako en 2015. Mais depuis plusieurs mois, elle accuse les militaires au pouvoir de ne pas tenir leurs engagements.

Le Mali est-il au bord d’un nouveau conflit ? Les ex-rebelles du nord du Mali se sont dits, lundi 11 septembre, « en temps de guerre » avec la junte au pouvoir à Bamako, dans un communiqué reçu par l’Agence France-Presse et diffusé sur les réseaux sociaux.

Dans ce communiqué intitulé « communication en temps de guerre » et authentifié par un porte-parole, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), une alliance de groupes à dominante touareg qui a combattu l’Etat central avant de signer un accord de paix avec lui en 2015, appelle « tous les habitants de l’Azawad à se rendre sur le terrain pour contribuer à l’effort de guerre dans le but de défendre et protéger la patrie et ainsi reprendre le contrôle de l’ensemble du territoire national azawadien ». Azawad est un nom d’origine touareg pour le nord du Mali, objet d’anciennes revendications indépendantistes touareg.

Les tensions n’ont cessé de croître depuis des mois entre la CMA et la junte, faisant redouter la fin de l’accord de paix dit d’Alger et la reprise des hostilités engagées en 2012. Des insurrections indépendantistes et salafistes avaient alors plongé ce pays pauvre et enclavé dans une profonde crise sécuritaire, politique et humanitaire dont il n’est toujours pas sorti.

La CMA appelle les civils à rester à distance des positions des « terroristes FAMa/Wagner » (forces armées maliennes et Groupe Wagner russe) dit le document, qui se veut le premier communiqué de « l’Armée nationale azawadienne ». Les militaires qui ont pris le pouvoir par la force en 2020 au Mali sont très largement considérés faire appel aux services du Groupe Wagner depuis 2021, malgré leurs démentis.

« Riposte en légitime défense »

La CMA se garde de parler de déclaration de guerre de sa part, mais évoque une « riposte en légitime défense » à ce qu’elle appelle « l’agression » de l’armée nationale malienne et des mercenaires de Wagner. Elle les accuse de « crimes de guerre » et de « crimes contre l’humanité ». Samedi, la CMA avait affirmé avoir abattu un avion de l’armée malienne après un bombardement sur ses positions dans la région de Gao. L’état-major malien a assuré pour sa part que l’appareil s’était écrasé à cause de problèmes techniques, mais que son équipage avait réussi à s’éjecter.

Cette escalade coïncide avec une reconfiguration sécuritaire dans le Nord après le départ de la force antidjihadiste française en 2022 et celui, en cours, de la mission de l’ONU (Minusma), toutes deux poussées vers la sortie par la junte. La CMA n’entend pas que la Minusma rétrocède ses camps aux autorités maliennes, comme elle l’a fait en août à Ber, près de Tombouctou. Elle estime qu’en vertu des arrangements de 2014 et 2015, ces zones devraient revenir sous son contrôle.

Les djihadistes exercent, eux aussi, une forte pression sur Bamako. Une double attaque qui leur est imputée, dont l’une contre un bateau de passagers sur le fleuve Niger, a tué au moins 64 personnes, dont des dizaines de civils jeudi entre Tombouctou et Gao, selon un bilan gouvernemental. Tombouctou est soumise depuis août à un blocus du Groupe de soutien de l’islam et des musulmans, alliance affiliée à Al-Qaida. Des obus sont tombés lundi sur l’aéroport de Tombouctou. La compagnie Sky Mali a annoncé suspendre ses vols de et vers Tombouctou et Gao cette semaine, aggravant l’isolement des grandes villes du Nord.

 

Après le gouvernorat de Gao ce week-end, celui de Tombouctou a décrété un couvre-feu nocturne reconductible de trente jours, jusqu’au 10 octobre, de 20 heures à 6 heures, heure locale (de 22 heures à 8 heures à Paris).

 

lemonde.fr

Le 12 septembre 2023

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