BROUILLAMINI à la guinéenne… à Paris

                       BROUILLAMINI à la guinéenne… à Paris

 

Du rififi d’un mauvais goût s’est produit à l’Ambassade de Guinée en France, entre deux ambassadeurs, l’un en fonction et en disgrâce, et l’autre, pressenti depuis quelque temps à ce poste, tout frais émoulu sorti de notre sérail parisien. Ambassadeur désigné ! Enfin, il en fallait un, moulé à notre convenance franco-guinéenne, nous si difficiles à satisfaire et à convaincre !

On avait oui dire, en effet, qu’on concoctait aux Parisiens un diplomate de haut rang, pondéré comme un de ses frères, installé avant lui à ce poste et qui avait conquis la France. Mais on n’avait pas prévu de quelle manière le nouvel ambassadeur pénétrerait dans notre antre. Eh bien, il s’est déjà installé de lui-même, par bien des tractations, prenant de l’avance sur l’habituelle cérémonie de présentation de ses lettres, à peine son nom murmuré à nos oreilles indiscrètes. Il s’est intronisé, sur injonction de son ministère (paraît-il) pour ne rien rater de la présence officielle à Paris du Président démocratiquement élu de la Guinée, Alpha Condé. Un jour faste de grand rassemblement, sur lequel comptait aussi l’ancienne Mme l’ambassadeur pour dépoussiérer, à juste titre, une image écornée à tort ou à raison par la faute de ses premiers conseillers, tous envolés depuis.

L’ambassadeur désigné a pris tout le monde de court, avec un risque inutile d’entamer très tôt son image, en prenant fonction anticipée, par effraction. Plutôt que d’effacer à son avantage le peu de crédit de confiance qui entoure encore la maison Guinée de France depuis des années, il a rajouté sur son compte personnel de nouvelles inimitiés. Lui si plein d’expériences, habitué aux honneurs douillets de l’UNESCO, bardé sans doute de culture universelle et de civilités enviées, forcément respectueux de l’ordre et de bonnes mœurs ! Mais non, geste inattendu et maladroit de prendre possession de ses bureaux de la sorte, sans attendre un jour de plus. S’il n’avait pas agi ainsi, rétorquera-t-on pour sa défense, il aurait raté l’occasion idéale d’être adoubé. N’est-ce pas ?

N’empêche, un malaise sournois s’est installé depuis dans notre communauté de France, une mauvaise affaire de plus. Comment expliquer autrement ce jeu de passation de témoin, extorqué, entre diplomates, en violation des convenances propres à nos sociétés ? Pourquoi le nouvel ambassadeur désigné, logiquement dans ses droits, n’a pas pris des gants et ne s’est pas armé d’un zeste d’orthodoxie diplomatique, qualités qui siéent à son nouveau statut ? On est, ne l’oublions pas, dans un monde d’écoutes feutrées, où on est plus prompt aux contorsions dialectiques des débats et des mots alambiqués, quand il s’agit de régler des conflits. Quel empressement a donc pu pousser un promu à un poste, un poste qu’il aurait occupé de toutes les façons, sans contestation, à s’auto introniser sans cérémonial ? Comme s’il avait peur que ne fût remise en question la décision de publication du décret de sa nomination et de son accréditation à Paris !

J’aurais presque compris sa maladresse, si nous étions encore restés à notre passé de régime militaire de chacun pour soi. Mais, il y a eu changement en Guinée et nous sommes déterminés à améliorer nos comportements et nos vies de malheur sans fin. Avec euphorie, beaucoup d’entre nous caressent, fort légitimement, l’idée noble de se rendre utiles maintenant et tout de suite. Mais prenons le rendez-vous d’accomplir la mission qui nous serait confiée sans chercher à frustrer nos devanciers. Qu’on les aime ou qu’on les déteste, ils ont eu aussi en tête de bien jouer leur partition. La volonté y a aussi été, même s’ils n’ont pas toujours eu la maîtrise du tempo et qu’aujourd’hui encore certains sont mus par des conduites qui contrastent avec leurs propos.

Mais ce qui s’est passé à l’Ambassade de Guinée en France ne peut être comparé qu’à un dénouement d’un western américain, où le justicier, fort de son adresse à manipuler le pistolet, désarme ou élimine le shérif sans coup férir, avant d’arracher l’insigne distinctif de l’autorité à terre et de l’épingler à son propre gilet ou poncho mexicain, sous le regard amusé des comparses et de l’approbation mitigée du public.

Assurément, il y a eu maladresse en voulant faire déguerpir l’ex-ambassadeur avant la visite du Président Alpha CONDE. Qu’est-ce que cette sentence a-t-elle apporté de bénéfice, sinon qu’un discrédit. On aurait pu réserver à notre dame, si décriée et si vilipendée, une sortie normale, c’est-à-dire conforme aux mœurs et à la courtoisie, à défaut d’être solennelle, en l’associant jusqu’au bout à la confection du programme de visite officielle à Paris de Alpha CONDE, son Président à elle aussi. L’ambassadeur désigné aurait même pu, magnanime et observateur privilégié, la laisser finir son travail, qu’elle avait commencé. Les honneurs leur seraient revenus, à tous les deux. Pourquoi ne pas partager ? Notre futur ambassadeur aurait ainsi atterri parmi nous, d’avance bien armé d’un bon climat de confiance. L’épilogue aurait été parfait pour la communauté et chacun se serait retourné chez lui gargarisé de commentaires laudatifs, plus consensuels sur la tolérance. Avec le temps et les résultats prometteurs, nous aurions même oublié ou pansé les faiblesses de nos diplomates, à l’exemple du geste symbolique de Président Alpha qui a fait un clin d’œil hautement significatif à ses défunts prédécesseurs.

Le départ de la désormais ex-Mme l’Ambassadeur n’était-il pas programmé depuis l’ère Dadis CAMARA, comme l’est toujours celui de la presque totalité de ses anciens collaborateurs. Pourquoi a-t-il traîné aussi longtemps ? Souhaitons que son exécution soit suivie de l’arrivée rapide d’un nouveau corps rompu à une gestion saine de l’Ambassade de Guinée et de son Consulat en France.

Souhaitons, malgré tout, à cette dame bien éprouvée, de se remette vite de son cauchemar et qu’elle s’attèle au travail rassembleur qu’on attend maintenant de chaque Guinéen, sans exclusive. Et bienvenue à notre cher Ambassadeur, Monsieur Amara Camara ! Nous présageons qu’il déploiera très vite, pour le bénéfice de son pays, ses qualités professionnelles indéniables de sa vie déjà comblée de fonctionnaire international. Parions qu’il ne laissera pas s’installer d’autres divisions à la maison, si l’on s’en tient aux propos sincères  de sa brève adresse aux commissions d’organisation de l’arrivée en France du premier magistrat guinéen, démocratiquement élu en Guinée, par les Guinéens.

 

Créteil, le 27 mars 2011

 

Tolomsè CAMARA


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Commentaires: 3
  • #1

    TEA MARTIAL (lundi, 28 mars 2011 01:11)

    la diplomatie ne s'improvise pas. elle est technique et pratique. mais qu'est ce que vous voulez dans une Guinee qui s'amuse alors que les choses serieuses ont commencé il ya de cela bien longtemps. en diplomatie la meprise ne pardonne pas. heureusement c'est entre des personnalités guinéennes et non envers les autres. dommage!

  • #2

    TEA MARTIAL (lundi, 28 mars 2011 01:22)

    MONSIEUR AMARA A OUBLIE qu'avant de prendre fonction, il doit être proposé et accepté par l'etat accreditaire avant de presenter ses lettres de créances qui le font entrer en fonction et lui reconnaissent le titre de representant. que de meprise. ancien nous vous respectons mais un peu de prudence. on a agit pas comme les politiques. il ya des règles dont le respect ou la violation peut aider ou enfoncer le pays. pardon un peu de serieux. à Makalé,l'habit qui ne t'es pas destiné, tu ne peux le porter de manière forcée. le diplomate aux missions, les sages femmes à maternité,les petites secretaires derrière leur machines, le mecaniciens au garage etc.. chacun à sa place pour un travail ordonné. merci

  • #3

    Cissé Oumar de Bma (lundi, 28 mars 2011 16:46)

    Ne mettez pas tout sur le Net pour l'éternité! Ce cher Tolomsè (pourtant philosophe), a inutilement rendu public (planétairement), ce que nous eûssions préféré débattre dans un cadre guinéo-guinéen strictement privé dans un cadre familial. Chacun d'entre nous est lié, d'une façon ou d'une autre par un long passé ''complice'' aux deux diplomates et connaissant personnellement le tact et la mesure exceptionnelle du nouveau venu, je doute fortement de ce comportement cavalier ''reproché'' à Monsieur Camara.