Burkina: des soldats tirent en l'air à Ouagadougou et pillent des boutiques

Le 4 mars 2007
Le 4 mars 2007

Des soldats burkinabè sont sortis de deux camps militaires de Ouagadougou et ont tiré des coups de feu en l'air durant la nuit de mardi à mercredi, pillant des boutiques, après la condamnation de cinq des leurs dans une "affaire de moeurs", a-t-on appris de sources concordantes.

"Une dizaine de personnes ont été blessées" lors de ces manifestations, a indiqué le ministère de la Défense dans un communiqué, sans plus de précision.

Le ministre Yéro Boly "en appelle au calme et à la retenue et invite les populations à vaquer normalement à leurs occupations", selon le texte.

Des soldats ont tiré à l'arme légère à partir de 22H00 (locales et GMT) au camp Sangoulé Lamizana à Goughin (quartier ouest de la ville), sont ensuite sortis en tirant en l'air dans les rues jusqu'au camp Guillaume Ouédraogo, principale garnison du pays en plein coeur de Ouagadougou, où d'autres militaires se sont joints à eux, ont rapporté à l'AFP des habitants.

Les troubles ont duré environ cinq heures, selon ces témoins.

Sur leur parcours et aux abords du marché central, des stations service et des échoppes ont été pillées. Dans la matinée, de petits commerçants ont protesté contre ces pillages en brûlant des pneus sur la voie publique.

"Je n'arrive pas à comprendre que des hommes en tenue me fassent ça. Ils ont cassé mes boutiques, ils ont tout pillé, ordinateurs, téléphones portables, même les accessoires. Il y a un soldat qui a laissé son arme ici", a déclaré à l'AFP un commerçant, Eloi Nikiema.

Les soldats ont tiré pour marquer leur "désapprobation d'une décision de justice" qu'ils ont "jugée trop dure", a déclaré à l'AFP un haut responsable de l'armée sous couvert de l'anonymat.

Mardi, la justice "a condamné quatre soldats à 15 mois ferme et le principal accusé à 18 mois ferme pour une affaire de moeurs, parce qu'ils ont battu un civil qui faisait la cour à la femme" de l'un des condamnés, a-t-il affirmé.

Ce jugement "signifie que les condamnés sont radiés de l'armée, d'où la manifestation de désapprobation de leurs camarades. C'est une manifestation de solidarité de quelques soldats", a ajouté cette source.

La prison militaire, où sont détenus les cinq militaires - un sous-officier et quatre soldats -, est située dans le camp Sangoulé Lamizana.

Selon la radio nationale, les soldats protestataires s'étaient rendus dans la nuit au domicile privé du ministre de la Défense et y ont fait de "nombreux dégâts matériels". "Ils n'ont pas saccagé", a démenti une autre source à l'état-major, ajoutant que "personne n'a été blessé".

Selon cette source, "le calme est revenu, les soldats ont été sensibilisés, ils ont compris. Tout est rentré dans l'ordre. On est en train de ramasser les armes".

Des "discussions" ont été engagées par la hiérarchie militaire avec des représentants des soldats mécontents pour "examiner leurs revendications", a dit ce responsable.

Selon une source proche du ministère de la Défense, les protestataires réclament notamment la "libération des soldats condamnés", l'assouplissement des conditions d'accès aux stages de formation pour les simples soldats, et que les leaders de la grogne "ne soient pas punis".

Les condamnés ont fait appel mercredi du jugement rendu mardi par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou, et demandé une mesure de liberté provisoire.

La capitale a tourné au ralenti toute la journée et avait même des airs de ville morte dans l'après-midi, avec ses commerces et ses services publics fermés.

 

AFP


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