Guinée : Maître Mohamed Traoré retrouvé torturé (avocats)

Maître Mohamed Traoré, vient d’être retrouvé dans un état préoccupant, après avoir été enlevé à son domicile à Sonfonia dans la matinée. Selon des sources concordantes au sein du Barreau Guinéen, il aurait été sévèrement torturé par ses ravisseurs, toujours non identifiés, mais dont la méthode et le timing rappellent tristement les disparitions ciblées qui se multiplient depuis plusieurs mois sous la transition militaire du CNRD.

 

Maître Traoré, figure respectée du barreau guinéen et fervent défenseur de l’État de droit, a toujours pris des positions fermes contre les dérives autoritaires de la junte, notamment sur les violations systématiques des droits humains. Il défendait des dossiers sensibles comme ceux du Colonel Célestin Bilivogui, de Saadou Nimaga, ou encore de Foniké menguè, Billo Bah, Habib Marouane et tant d'autres civils et militaires victimes d’enlèvements arbitraires, avait de se rendre récemment aux lieux saints de la Mecque pour l'accomplissement du hadj.

 

A peine rentré à Conakry le mercredi passé, il rejoint malgré lui, la longue liste de personnalités persécutées pour leur engagement.

 

Depuis bientôt 4 ans, la Guinée vit dans une vague répression sourde mais redoutable et extrêmement préoccupante. Enlèvements, détentions secrètes, tortures, disparitions forcées, assassinats ciblés, voilà le quotidien réservé à ceux qui osent contester les abus du régime de Conakry.

 

Habib Marouane Kamara, journaliste disparu depuis plus de cinq mois. Saadou Nimaga, ancien haut cadre de l'administration enlevé à l’hôtel Kaloum, sans aucune trace à ce jour. Foniké Menguè, Billo Bah et tant d'autres noms qui résonnent comme des blessures ouvertes dans la conscience collective.

 

Ces figures de la presse, de la société civile, du monde judiciaire, de l’armée ainsi que plusieurs anonymes, sont marquées par le fer de la répression sauvage du pouvoir en place qui les a réduits au silence dans la brutalité ou par la disparition forcée sans aucune nouvelle.

 

Ce qui est arrivé à Maître Mohamed Traoré, n’est pas un fait divers. C’est un signal d’alarme, un de plus, qui montre jusqu’où la transition guinéenne s’est éloignée de ses promesses de refondation. Lorsqu’on torture un avocat pour ses idées, lorsqu’on fait disparaître un journaliste pour ses enquêtes, lorsqu’on enlève un citoyen pour ses convictions, ce n’est plus une transition, c’est une tyrannie.

 

Il y a quelques mois, Abdoul Sacko, Coordinateur du Forum des Forces Sociales de Guinée, avait aussi fait l'objet du même modus operandi avant d'être retrouvé dans un état critique non loin d'un camp militaire à Forécariah.

 

Face à cette spirale répressive, le silence n’est plus une option. Il est urgent que les forces vives de la nation, les citoyens, les intellectuels, les partis politiques, les organisations sociales, religieuses et professionnelles, se mobilisent pour exiger la libération de toutes les personnes enlevées et détenues illégalement ; mettre fin aux pratiques de tortures, d’intimidation et d’oppression et de rétablir l’État de droit dans son intégrité.

 

La Guinée ne peut pas se construire sur les cendres de la peur et sur les cris étouffés de ses enfants les plus courageux.

 

L’histoire retiendra ceux qui se sont tus face à l’injustice et ceux qui se sont levés pour dire ça suffit.

 

 

Mamoudou Babila KEÏTA Journaliste d'investigation

 

Éditorialiste. Voix libre en exil.

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