Afrique du Sud: la motion de défiance contre Zuma sera votée à bulletin secret

Le Cap (AFP) - La présidente du parlement sud-africain a créé la surprise lundi: les députés voteront à bulletin secret la motion de défiance contre le chef de Jacob Zuma, une décision qui pourrait encourager des députés de l'ANC au pouvoir à lâcher Jacob Zuma controversé jusque dans ses rangs.

Pour être adoptée mardi, la motion de défiance, qui a été déposée par l'opposition, doit recueillir la majorité absolue des députés, soit 201 voix. Le Congrès national africain (ANC), de feu Nelson Mandela y possède une confortable majorité de 249 sièges.

L'opposition réclamait un vote à bulletin secret, convaincue de pouvoir "retourner" des députés du Congrès national africain (ANC, au pouvoir) s'ils n'ont pas la pression d'un scrutin à main levée.

Le président Zuma est empêtré dans une série de scandales politico-financiers, qui l'ont affaibli au sein même de l'ANC où on s'inquiète des conséquences électorales de ce climat malsain.

Si la défiance était votée, le chef de l'Etat et le gouvernement devraient démissionner.

Dans les minutes suivant l'annonce de Mme Mbete, l'ANC s'est empressé de dire qu'il n'avait "aucun doute sur l'échec de cette motion, comme ce fut le cas pour beaucoup d'autres dans le passé". "Nous ne doutons pas de la loyauté" des députés de l'ANC, a ajouté le parti.

Le président Zuma, au pouvoir depuis 2009 et dont le dernier mandat expire en 2019, a déjà survécu à trois motions de défiance.

La colère gronde cependant depuis des mois dans les rangs du parti au pouvoir, qui a mal vécu son revers historique aux élections municipales d'août 2016 et difficilement digéré le limogeage en mars du ministre des Finances Pravin Gordhan, pourfendeur de la corruption.

L'Afrique du Sud "est le témoin d'un vol à grande échelle, qui laisse le pays appauvri et de plus en plus entre les mains d'un gouvernement de criminels", ont dénoncé les vétérans de l'ANC, dont certains ont combattu, aux côtés de Nelson Mandela, pour l'abolition de l'apartheid.

Le Parti communiste, membre de la coalition tripartite au pouvoir, a lui "réitéré", pas plus tard que la semaine dernière, son appel au président Zuma à démissionner. Il n'a toutefois pas donné publiquement de consigne de vote à ses députés qui sont membres du groupe parlementaire de l'ANC.

- "Plus d'excuse pour faire tomber Zuma" -

Après une décision de la Cour constitutionnelle, la balle était dans le camp de Baleka Mbete pour trancher entre bulletin secret ou main levée, comme c'est la tradition.

Le principal parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA), s'est réjoui de sa décision. "Les députés de l'ANC n'ont aucune excuse et doivent utiliser leur vote pour dénoncer la corruption et faire tomber le président Jacob Zuma", a lancé la DA.

Selon les analystes, le départ de M. Zuma mardi est toutefois improbable. Il devrait "s'en sortir", même si quelques députés votent contre lui, a déclaré à l'AFP Judith February.

"Il est improbable qu'un nombre significatif de députés de l'ANC soient prêts à voter contre leur propre parti", a aussi réagi l'analyste Daniel Silke.

"Je ne pense pas que l'ANC veuille que l'avenir du président soit dicté par une motion de défiance déposée par l'opposition", a-t-il ajouté à l'AFP rappelant que l'ANC pourra faire son propre ménage en décembre lors de sa conférence nationale.

A cette occasion, l'ANC élira son nouveau président qui prendra la succession de M. Zuma à la tête du parti. Ce nouveau dirigeant est assuré de devenir chef de l'Etat en cas de victoire de l'ANC aux prochaines élections en 2019.

Deux noms figurent parmi les favoris pour lui succéder à la tête de l'ANC: l'actuel vice-président Cyril Ramaphosa, chef des frondeurs anti-Zuma, et Nkosazana Dlamini-Zuma, l'ancienne patronne de l'Union africaine (UA) qui a le soutien du chef de l'Etat, son ex-mari.

Mme Mbete fait aussi partie des candidates possibles. Sa décision lundi d'autoriser un vote à bulletin secret est "surprenante", compte tenu de sa loyauté sans faille jusqu'à présent vis-à-vis de M. Zuma, a souligné Judith February. Mais son annonce est aussi "stratégique", compte tenu de ses ambitions, a-t-elle laissé entendre.

AFP
Le 7 août 2017

Écrire commentaire

Commentaires: 0