Jeudi 1er octobre, le laïcat catholique de la capitale de Guinée devait organiser une marche de protestation contre l’expropriation abusive des domaines de l’Église à Kendoumayah, à 55 km de Conakry. En lieu et place de cette manifestation, il a tenu une conférence de presse.

Laurent Aimable Leno, secrétaire général du Conseil diocésain du laïcat de l’archidiocèse de Conakry revient sur les grandes lignes de cette rencontre.

Quel est le problème exact concernant les terrains de l’Église menacée d’expropriation à Kendoumayah ?

Laurent Aimable Leno : Deux terrains de l’Église sont, en fait, visés par des tentatives d’expropriation abusive. Le premier est un terrain qui mesure 35 hectares. Il se trouve à Kilifeneriah, dans le district de Kendoumayah. Les autorités administratives ont donné l’autorisation à des habitants de lotir ce terrain donné à l’Église par arrêté ministériel.

Le second terrain qui est en face du monastère de Kendoumayah a été acheté par la communauté des frères de Saint-Jean avec des documents qui existent, ainsi que des témoins de l’acte d’achat. Les autorités administratives ont aussi donné aux habitants l’autorisation de le lotir tout en empêchant toute activité de la communauté sur ce lieu. C’est sur ce deuxième terrain acheté par la communauté de Saint-Jean qu’une action en justice est en cours.

Pourquoi avez-vous renoncé à la marche prévue le 1er octobre ?

Laurent Aimable Leno : Nous avons renoncé à la marche et organisé une conférence de presse à la place pour plusieurs raisons. La première est que l’archevêque de Conakry, Mgr Vincent Coulibaly, a adressé des courriers aux autorités guinéennes, en premier le chef de l’État, ensuite le ministre de la justice, le ministre d’État, ministre de l’administration. Le chef de l’État [Alpha Condé NDLR] a réagi en demandant aux autorités judiciaires d’agir convenablement en prenant les mesures conformes à la loi. Quand nous avons appris cela, nous nous sommes dit qu’il ne fallait pas qu’on marche pour dénoncer une situation qui pourrait être en cours de résolution. De plus, Mgr Vincent Coulibaly a demandé que l’on puisse surseoir à cette marche puisqu’il est lui-même en pourparlers avec les autorités compétentes.

Après sa demande et au vu l’évolution de la situation sur le terrain dans le sens de la réconciliation, après plusieurs échanges entamés avec tous les acteurs impliqués dans cette affaire, nous avons décidé de ne pas faire une marche pour le moment. La conférence de presse organisée en lieu et place nous a permis d’expliquer l’historique de ce contentieux : comment les terrains ont été acquis ainsi que leur sacralité. Nous avons enfin interpellé le président de la République et son gouvernement afin qu’ils interviennent pour régler ce problème.

Comptez-vous mener d’autres actions pour que l’Église récupère ses terrains ?

Laurent Aimable Leno : Nous allons mener beaucoup d’activités en privilégiant le dialogue et les échanges. Nous avons mis en place un chronogramme pour échanger avec tous les acteurs, d’abord, les quatre institutions de l’Église qui sont sur place, la communauté des frères de Saint Jean, les sœurs bénédictines, la communauté des Petites sœurs de Notre Dame de Guinée et le petit séminaire. Nous allons ensuite rencontrer les jeunes qui ont barricadé les routes en réclamant ces terrains de l’Église. Nous allons aussi échanger avec les femmes de la localité. Par la suite, nous allons rencontrer les notables et sages et le préfet.

L’objectif est de comprendre les motivations de ceux qui veulent accaparer ces terrains de l’Église. De retour à Conakry, nous allons échanger avec l’imam de la grande mosquée et certaines autorités du pays. La justice va bien sûr se prononcer mais nous voulons privilégier la cohésion sociale. Car il faut bien faire comprendre à tout le monde que l’Église n’a jamais accaparé les biens d’autrui et qu’elle a légalement acquis toutes ses terres.

Le Conseil du laïcat va, par ailleurs, inviter les fidèles chrétiens à un temps de prière et de jeûne de trois jours que nous établirons dans les prochains jours pour confier tout cela au Seigneur afin que la vérité triomphe.

Recueilli par Lucie Sarr
africa.la-com
Le 6 octobre 2020
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