Emmanuel Macron et le gouvernement dénoncent des failles dans la politique d’immigration en France alors qu’un débat parlementaire se tiendra fin septembre.

Le débat est lancé. Emmanuel Macron a ouvertement évoqué l'immigration dans son discours face aux parlementaires de la majorité, lundi soir. « Nous sommes une terre d'immigration. Cela crée des tensions, mais il faut le regarder en face », a argué le chef de l'Etat.
Un débat sur ce sujet doit avoir lieu à l'Assemblée nationale le 30 septembre. Matignon prépare d'ailleurs un « document de synthèse » sur la politique migratoire de la France, a appris mardi l'AFP auprès de l'entourage du Premier ministre Edouard Philippe. Et les réactions sont déjà vives.
« Toutes les propositions que nous avons mises sur la table pour empêcher ce détournement, notamment, du droit d'asile, ont été blackboulées par les députés En marche ! », s'est exclamée Marine Le Pen ce mardi matin sur RMC et BFMTV. D'un autre côté, des responsables de gauche et une partie de la majorité ont déjà fait part de leurs craintes sur la tenue que prendront les discussions.

Que peut-on dire de la réalité chiffrée en France? Que disent les données dont nous disposons sur les flux migratoires? Éléments de réponse sur un sujet souvent sensible.

Forte hausse de l'aide médicale d'Etat

Elle alimente régulièrement de nombreux fantasmes. L'Aide médicale d'Etat (AME) bénéficie aux étrangers en situation irrégulière sur le sol français, pour qu'ils puissent bénéficier gratuitement de soins. Un rapport parlementaire de 2015 estimait que 70 % de l'AME concernait des frais hospitaliers liés à des maladies graves, comme la tuberculose ou le VIH, et certains accouchements.

Environ 310 000 personnes en bénéficient par an, selon les derniers chiffres connus. Ce nombre est en hausse ces dernières années, passant de 155 000 à près de 300 000 en 2014. Logiquement, son coût a également fortement progressé. Environ 400 millions d'euros étaient dépensés il y a quinze ans, alors que 934,9 millions d'euros ont été budgétés dans le projet de loi de finances 2019.

Droit d’asile, AME, flux migratoires : le vrai du faux sur l’immigration en France

Le gouvernement réfléchit à restreindre l'accès à l'AME. Deux pistes semblent se dégager : soit via les critères pour en être bénéficiaire, soit via le nombre de soins qui peuvent être remboursés. Selon les Échos, le gouvernement pencherait plutôt pour la deuxième option, car « il y a trop d'opérations non urgentes que demandent des soi-disant demandeurs d'asile ».

De quel type d'abus peut-il s'agir? Le secrétaire général de LREM, Stanislas Guerini, avait évoqué sur CNEWS le cas de « prothèses mammaires ». Ce à quoi la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, avait rétorqué n'avoir « aucune information particulière » sur de tels cas possibles.
Un nombre record de demandeurs d'asile mais la même proportion de demandes acceptées

123 625 : c'est le nombre total de demandeurs d'asile en France en 2018, selon le dernier rapport annuel de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Ce nombre est en hausse de 22,7 % par rapport à l'année précédente, après des augmentations déjà de 7,1 % en 2016 et de 17,5 % en 2017. En clair, le rythme d'augmentation s'amplifie.

Concernant les demandeurs (mineurs accompagnants inclus) qui font leur premier dossier, 10 370 viennent d'Afghanistan, en hausse d'environ 55 % par rapport à 2017. Le boom est aussi fortement dû à la Géorgie, dont sont originaires en 2018 6751 premiers demandeurs, en hausse de plus de 260 % (hors mineurs accompagnants).

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Les hommes restent majoritaires (66,8 %, contre 65,3 % en 2017) alors que l'âge moyen des demandeurs d'asile baisse légèrement, pour s'établir à 30,9 ans.

27 % des demandes ont abouti l'an dernier, stable par rapport à l'année précédente. Mais le pourcentage d'admission varie beaucoup selon les pays. 91,9 % des demandeurs d'asile syriens et 65,4 % des Afghans (hors mineurs accompagnants) ont obtenu gain de cause en 2018, contre seulement 4,6 % des Géorgiens.

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Lundi soir, Emmanuel Macron a pointé certaines demandes d'asile abusives à ses yeux. « Je crois en notre droit d'asile mais il est détourné de sa finalité par des réseaux, des gens qui manipulent », a expliqué le chef de l'Etat aux parlementaires de la majorité.

Moins de migrants par la Méditerranée

Si « les demandes d'asile n'ont jamais été aussi hautes en France », comme l'a rappelé Emmanuel Macron, celui-ci a aussi souligné que « les flux d'entrée n'ont jamais été aussi bas en Europe ». Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, près de 70 000 réfugiés sont arrivés en Europe par la Méditerranée cette année (du 1er janvier au 16 septembre). Il y en avait eu 141 472 sur toute l'année 2018, et 373 652 en 2016. On s'éloigne donc de plus en plus du pic de 2015, avec 1 032 408 arrivées.

Si le flux de migrants dans cette zone baisse, le nombre de premiers titres de séjour délivrés en France reste au même niveau, et même en petite hausse : 255 956 l'an dernier, contre 247 436 en 2017, selon le ministère de l'Intérieur. Les deux principaux motifs d'admission sont la famille et les études. Arrivent ensuite, au même niveau, les raisons économiques et humanitaires. Des chiffres qui ne tiennent pas compte des étrangers qui rentrent chaque année dans leur pays d'origine, comme cela peut être le cas des étudiants.

Enfin, la place Beauvau note que 30 276 étrangers en situation irrégulière sur le territoire ont quitté le territoire français en 2018.


leparisien.fr, Par Nicolas Berrod avec Victor Alexandre

 

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Le 17 septembre 2019

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