Affaire DSK: les faits, les indices et les ragots

Mieux qu'un feuilleton télé, l'affaire DSK déclenche depuis 4 jours des milliers de réactions, rumeurs et contre-vérités. Etats des lieux de ce que l'on sait. Ou pas.

A 16h45 (22h45 heure française), les policiers de New York interpellent Dominique Strauss-Kahn dans l’avion qui doit le conduire à Paris. Ils le conduisent en garde à vue. DSK est accusé d’"agression sexuelle" sur une employée de l’hôtel Sofitel (près de Time Square) dans lequel il a passé la nuit de vendredi à samedi.

Le déroulement de l’agression présumée

On ne dispose ici que d’une seule version officielle: celle des enquêteurs, qui distillent des informations au compte-goutte et ont déjà changé plusieurs fois de version.

Selon la police new-yorkaise, citée par le New York Times, la jeune femme serait entrée dans la chambre sans s’apercevoir que DSK était sous la douche. Il serait alors sorti nu de la salle de bains et l’aurait pourchassée. Après avoir verrouillé la porte, il l’aurait poussée dans la chambre pour tenter d’abuser d’elle. Comme elle se serait débattue, il l’aurait tirée dans la salle de bain et forcée à lui faire une fellation. La femme de ménage aurait réussi à s’enfuir et aurait alerté ses supérieurs.

DSK aurait, lui, quitté l’hôtel peu après l'heure supposée de l'agression.

L’heure des faits

Première version de la police : l’agression aurait eu lieu vers 13 heures. Mais les registres de l’établissement indiquent que DSK est en fait parti « à 12h28 », horaire confirmé par le groupe Accor. Volte-face de la police dimanche après-midi, qui déclare que la femme de chambre serait entrée « vers midi ». « Nous avions dit aux enivrons de 13 heures mais en fait l’horaire était plus proche de midi », a déclaré le porte-parole du NYPD, la police de New York, à Libération. Une version qui serait plus plausible, les supérieurs de la femme de chambre confirmant que la victime leur a notifé l’agression à 12h30.

Toujours selon les enquêteurs, une vidéo de surveillance montrerait DSK « pressé » sortant du Sofitel. Or, selon les avocats de la défense, « s’il s’est dépêché, c’est parce qu’il avait rendez-vous pour déjeuner ».

Le déjeuner

RMC et Le Monde affirment que DSK aurait donné rendez-vous à sa fille dans un restaurant. Camille, 26 ans, issue d’un précédent mariage de DSK, étudie en effet à la Columbia University. Le Monde, qui cite des proches d’Anne Sinclair dans son édition de mardi, évoque un coup de fil que celui-ci aurait passé à sa femme « après avoir déjeuné avec sa fille ».

Un départ précipité?

DSK serait parti "précipitamment", en oubliant notamment l'un de ses portables. Selon une première version des autorités, DSK aurait appelé l’hôtel à 15h40 pour dire qu’il ne retrouvait plus son téléphone. Il aurait alors demandé de le rapporter à l’aéroport, ce qui aurait permis aux policers de le localiser et de l'interpeller.

De nouvelles informations indiquent cependant qu'aucun effet personnel de DSK n'a été retrouvé à l'hôtel.

Le Monde, citant "un des proches" d'Anne Sinclair évoque également un appel de DSK à sa compagne dans le taxi qui l’amenait à l’aéroport. Il lui aurait confié qu’il s’était passé « quelque chose de grave ».

La juge Melissa Jackson a refusé la libération sous caution de DSK sous prétexte que celui-ci a été arrêté dans un avion et qu’il pouvait « fuir ».

Alors que Le Telegraph évoque un contrat spécial avec Air France lui permettant d’obtenir une place en première classe à la dernière minute, Benjamin Brafman, son avocat, a lui affirmé que le vol était reservé: "Ce n'est pas quelqu'un qui s'apprêtait à monter dans un avion afin de fuir la scène d'un crime."  

La femme de chambre

La femme de chambre est l’objet d’une véritable traque de la part des médias du monde entier. D’abord prénommée Ophélia, la jeune femme s’appelle en fait Nafissatou Diallo. Elle a 32 ans, est originaire de Guinée et travaille au Sofitel depuis trois ans. Un communiqué du directeur de l’établissement indique qu’elle donnait « entière satisfaction tant en ce qui concerne la qualité de son travail que son comportement ».

Arrivée aux Etats-Unis il y a 13 ans pour suivre son mari, selon Slate, qui s’est entretenu avec des membres de sa famille, elle est aujourd’hui divorcée et vit seule avec sa fille de 15 ans dans le Bronx.

La jeune femme est bénéficie d'une surveillance policière « inédite »  selon un ancien procureur de New York cité par France Info, pour la protéger de l’exposition médiatique, mais aussi d'éventuelles tentatives de corruption.

Son frère, restaurateur dans le Bronx et cité par plusieurs médias, affirme que Nafissatou Diallo l’a appelé juste après les faits:

"Elle m'a dit 'il vient de se passer quelque chose de grave'. Elle pleurait, elle n’arrêtait pas de pleurer. » Il ajoute que la jeune femme « ne savait pas qui était Dominique Strauss-Kahn au moment des faits. C’est moi qui lui ait expliqué qui il était quand elle m’a appelé ».

Le Figaro affirme aujourd’hui qu’une photo de DSK était affichée dans le local de service des employés de l’hôtel pour les informer qu’une personnalité « VIP » serait présente dans l’établissement.

Dernier rebondissement en date : Nafissatou Diallo était hébergée dans un foyer pour personnes atteintes du sida selon le New-York Post. L’information n’a pour le moment pas été confirmée par d’autres médias.

Des traces de griffure?

On ne dispose actuellement que d’une seule version concernant l’agression. Cependant, un rapport du consulat français de NYC, cité par Atlantico.fr, affirme que « des griffures ont été constatées sur le torse de l’auteur présumé ».

Par ailleurs, le haut responsable de la police new-yorkaise a précisé aux diplomates français que "des traces ADN (vraisemblablement de sperme) avaient bien été découvertes et qu'elle étaient en cours d'exploitation et de comparaison."

A l'inverse, un article du NY Daily News cite "des sources" affirmant que ni DSK ni la femme de chambre n'ont de griffures ou de traces de coups. Le résultat complet des analyses effectuées n’est pour le moment pas connu.

Un rapport consenti ?

Toujours selon le New York Post, DSK aurait avoué avoir eu des relations sexuelles avec la femme de chambre, mais « consenties ». Citant « une source proche de la défense », le journal affirme que c’est la version que les avocats plaideront.  Me Brafman aurait également affirmé pendant l’audience de lundi que « les preuves médico-légales ne coïncident pas avec un rapport forcé ».

La victime, par l'intermédiaire de son avocat, Jeff Shapiro, a quant à elle nié avoir eu des relations "consenties" avec DSK.

Où est Dominique Strauss Kahn ?

Depuis lundi soir et le refus de la juge Melissa Jackson de lui accorder une liberté sous caution, DSK est incarcéré dans la prison de Rikers Island, sur l’East River. Il bénéficie d’une cellule individuelle et n’est pas en contact avec les autres prisonniers selon un porte-parole de l’administration pénitentiaire cité par l’AFP.

La chaîne américaine NBC a révélé, en citant des sources non-identifiées, qu’il serait placé sous surveillance anti-suicide. C'est-à-dire qu’il serait contrôlé toutes les 30 minutes. L’information n’a pas été confirmée par la police de New York. Le Figaro confirme, citant "une source proche des forces de maintien de l'ordre".

Les avocats de DSK

Dominique Strauss-Kahn est défendu par deux « ténors » du barreau. Benjamin Brafman, 62 ans, a la réputation de ne « jamais perdre ses procès ». Il a déjà défendu Puff Daddy pour possession illégale d’armes, Jay-Z pour une agression sur son producteur ou Michael Jackson, pour des accusations d’abus sexuels sur mineurs. Ils ont tous les trois été acquittés.

William Taylor est lui considéré comme l’un des « dix meilleurs pénalistes » de Washington selon le Legal Times. Il a déjà conseillé DSK lors de l’affaire Piroska Nagy, sa subordonnée au FMI avec laquelle il a eu une liaison en 2008.

La procédure

Un jury populaire composé de 16 à 23 personnes tirées au sort, doit se réunir en huis-clos, sans juge, pour discuter des éléments de preuve et décider de l’inculpation du directeur du FMI. DSK se verra alors signifier cette inculpation lors d’une audience à la New York Supreme Court, audience qui a déjà été fixée à vendredi. DSK devra alors signaler si il plaide coupable.

Le procès serait organisé dans un délai de trois mois à un an.

 

Sept charges pèsent sur lui, dont acte sexuel criminel, tentative de viol, attouchements et séquestration selon le procès-verbal de la cour de NYC. Il risque de 15 à 74 ans de prison si les faits sont avérés.

Ce qu'on ne sait pas

Lors de l’audience de lundi, le procureur aurait évoqué une « deuxième affaire similaire ». Aucune information complémentaire n’a pour le moment été apportée.

Pourquoi DSK était à l’hôtel Sofitel alors qu’il dispose d’un appartement à New York? Selon Libération de mardi, le Sofitel serait comme « un pied à terre » pour DSK et il y aurait séjourné une demie-douzaine de fois depuis un an.

Cerise Sudry-Le Dû


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